évidemment que j’ai pensé à lui
à Ezra, aussi
(à celleux qui m’ont brisé le cœur car il fallait bien tromper l’ennui)

mais surtout lui et ses études – toujours épatée de voir combien il lui était aisé de trouver le temps de me tromper alors que d’autres étudiants de médecine croulaient sous les travaux à rendre – et j’aurais dû
me douter

le cataclysme qui menaçait d’arriver la tornade au sourire narquois qui allait débouler ; Dégage. ça glisse de mes lèvres aussi vite qu’il est entré dans la pièce et son air
ravi
yeux plissés à l’idée de me tourmenter – Ethan, je plaisante pas. Dégage.
Ethan Ethan            Ethan    ça chamboule d’autant plus que le cœur est déjà en miettes à la suite des évènements récents
et qu’ont-elles, ces vermines, à revenir dans ma vie comme si elles n’étaient jamais parties
d’abord Ezra, et maintenant lui ? c’est trop, les poings que je resserre sur les draps et le regard noir
j’en
  ai
      assez
de les voir sereins comme s’ils ne m’avaient jamais blessé – assez de les voir entiers alors que je traîne mes morceaux comme une âme damnée –
assez
la tête pleine déjà et voilà qu’il vient parader ;
Le monde de la médecine va mal si on donne des diplômes à des escrocs comme toi. Qu’est-ce que tu veux ? et je brandis mon oreiller, prête à lui envoyer en pleine figure s’il ose
  (me traiter encore de jouet)
me provoquer.

et ce rire, ce rire tu te rappelles Ethan comme je l’ai tant aimé que je me serais coupée en quatre pour l’entendre encore et toujours
pour l’éternité

je t’ai        tant aimé

et je te hais si fort car tu étais tout et plus encore, tu étais mon sauveur mon absolution dans une période de ma vie où je ne cessais de chuter, tu étais
un phare aujourd’hui tu n’es qu’obscurité venue m’achever.

Ne me touche pas ! et l’oreiller part, violemment, m’arrachant un râle d’agonie car je ne suis pas rétablie — ma tension qui frappe les sommets à cause de ta présence de ta vilenie       va-t’en, disparais de ma vie ! — pour manquer la cible.
je crie, pour la première fois depuis que je suis ici — de quel d r o i t tu débarques, là, comme si on ne s’était pas ruinés dans une course à la toxicité

bravo Ethan, bravo
tu as gagné.
Je te jure, Ethan, si tu fais un pas de plus, je te ruinerais, ta vie sociale, ta carrière, tout !
mais
je sais
que nous nous battons sur le même terrain et que mes efforts seraient vains, je suis       écœurée d’avoir aimé un Némésis si parfait
Je préfère crever que de te laisser me toucher.

je t’ai         tant aimé — éloigne-toi de mes ruines que je désespère de bâtir sans toi,
sans vous
sans les souvenirs.

mais
 tu
           l’es.
tu l’es et c’est de ta faute et celle d’Ezra aussi si je suis dorénavant ainsi, un monstre voué aux facéties — immense blague que September devenue tout ce qu’elle a autrefois méprisée — et c’est vous
 vous vous v o u s votre poison qui s’est infiltré jusqu’au myocarde
  je ne sais plus aimer
alors
pourquoi
mon coeur bat-il encore lorsque je te regarde ; pourquoi revenir me hanter ;

La faute à qui ?! j’aboie, ma dernière irrévérence car déjà la fatigue guette et je retombe tête sur le lit. je n’ai pas la force de détester, pas aujourd’hui, pas après ce qui est arrivé au parc — Comme si tu ne savais pas ce qui s’était passé. la seule fouine à te rivaliser et en cela, vous étiez parfaits. J’ai les jambes ruinées. J'ai failli crever. et plusieurs personnes auraient pu mourir, pas que ça m’ait gêné par le passé, c’est mon métier après tout : vendre les pauvres gens sans sous à ceux qui peuvent se le payer et tant pis si cela entraîne leur mort,
  pourvu que je sois rémunérée — la différence est bête, superficielle (comme moi, ah), c’est que je ne les vois         pas. je ne vois pas Apollonia se vider de son sang entre mes bras, Babylone perdre conscience et Thomas braver les flammes pour la sortir de là
 je ne vois pas, jamais, et qu’il est bon d’avoir la conscience tranquille (aveugle) tant que je me tiens éloignée des boucheries ; Du coup désolée si t’étais venu t’amuser en espérant que je réagisse à tes conneries, j’suis pas en état. Prends ma tension et dégage de là, Ethan.
    ne me touche pas — je suis si vulnérable,
je pourrais       avoir besoin de toi.

et cette insolence ! cet air narquois, tu parades, fier de toi, Ethan, ça a toujours été ça – insaisissable et insupportable, d’une légèreté i n s o u t e n a b le
   comme je l’ai aimé, comme je t’ai aimé
dans tous tes défauts. je tends le bras, sourcils froncés ; s’il est une qualité que je t’admets, c’est peut-être la persévérance – dans le bon mais surtout dans le mauvais – et tu es médecin, je suis patiente. je te concède cette petite victoire.

   puis, habile, tu ne laisses place à aucun de mes états d’âme ; la Danse des Azalées.
ah je n’ai pas
            de mots pour cela. aucun qui me vient, lèvres pincées – Je sais. et certainement que je devrais ressentir une quelconque peine pour les victimes de cette affaire (une once de culpabilité, qui sait) mais
  rien
absolument rien si ce n’est le vide car c’est la réalité de nos vies, n’est-ce pas ? une ville où chacun redoute les attentats, où les gangs font leur loi et
toi
De toute façon, je m'attendais pas à de la compassion de ta part, je suis encore persuadée qu'aucun cœur ne bat sous ta poitrine.
  et moi au milieu de tout ça, on s’en fout – il n’existe que nous (que vous) et les souvenirs, je vous hais            dans une tentative désespérée de combler la monotonie et le vide que vous avez laissé. … T’as pas été blessé, toi ?
pour meubler le silence que je ne supporte plus
(pour savoir où tu étais ce jour-là,
    et dans quels bras)

le plus dur à admettre, c'est que tu as raison ;
en réalité, je me moque de tout ça, la superficialité que je feignais est devenue partie de moi.