miserable together — temperance
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Uranie Lecloizot |
Never sleeping always creeping
Jeu 20 Mai - 0:03
|
Clac, clac, clac.
Mesure asynchrone, ta canne rodée dénote le cliquetis de tes mules cirées. Dans le couloir calfeutré, tu te meus sans lendemains, le crâne boursoufflé par tes pensées décuplées.
L’imbécile, le mort né, le condamné t’as donné de quoi filer la tapisserie de tes humeurs usées. Il est pourtant impossible d’haïr l’âme rétrécie, aigrie de ce fameux costume gris.
Les mots ont couru jusque dans tes maigres bureaux prêtés, les bruits de couloirs sont venu envahir ta canopée.
Que le colosse est tombé, qu’une fêlure a été aperçue.
Dans la largesse de ton vocabulaire fleurie, la délicatesse de tes violences réfrénées, tu t’en es allée.
Apercevoir l’épave échouée, confirmer les dires affolés.
Le dos de la main frappe la porte cloisonnée, prend le silence pour une invitation à pénétrer dans l’antre bien gardée.
Silhouette endormie, chaire abandonnée.
Les mèches blondes ébouriffées soulignées par une lampe de bureau au néon cramé lui tire les traits. Ton doigt glisse pour l’éteindre, l’incandescente chaleur trahit la nuit passée à brûler dans l’obscurité.
Posée sur le coin du bureau, tu déposes ta troisième alliée à tes côtés, abaisse ta colonne décharnée, serpent qui vient siffler près du visage du bel alité.
Tu observes cette forme de vulnérabilité, de candeur dépravée. Le bout de l’ongle ploie sous la masse du cadre d’aluminium, referme l’écran noir de l’ordinateur déchu. Dernier vestige d’un bourreau acharné qui a su sauver la face d’une perdition abstraire aux psychotropes égarés.
Les bras en appuie, le cou tendu, tu sens le souffle endormie, un brin de vie s’échapper de ses narines, de ce corps endormie.
Pour une fois qu’il semble paisible.
Mais tu mets fin, sévèrement, à sa relation avec Morphée. L’ordinateur est reposé lourdement sur le bois sourd, cogne le vernis polie.
Les bras sont croisés tandis que les jambes sont tendues, un pied en l’air dont ta chaussure pend négligemment.
Le bout de celle-ci vient effleurer le genou, pousser le cartilage. Sans pression, ni violence, juste de quoi secouer les tissus endormis.
« Debout charogne. »
Clap, clap, clap.
Tu claques dans tes mains vernies, brise le silence blanc.
« J’espère que ta nuit a été douce Temperance car tes jours ici le seront beaucoup moins suite à la scène que tu as causé. »
Mendiante sous le balcon de l’endormie qui crie au scandal, aux romances mortes et à la courtoisie gangrenée, tu brises les rêves éveillés. Sous tes sourires de courtisane, de nourrice mal-aimante, tu étends tes commissures, bride tes lèvres douces.
HRP — ...
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Temperance Bland |
Never sleeping always creeping
Jeu 20 Mai - 14:53
miserable together
Il a été happé par le sommeil des ingrats, celui qui vient quand on s’y refuse et qui laisse plus éreinté au réveil. Une punition appropriée, repose-toi, qu’on t’a ordonné, mais toi tu as demandé qu’on t’apportes ton ordinateur et des sweat pour sauver le peu qu’il restait de ta dignité.
Temperance n’était pas fatigué, il allait même très bien. Malgré ce que les rumeurs avaient déjà commencé à faire croire à travers les couloirs du Hallmark, il n’avait pas été victime d’une vraie surdose. C’est ce que tu t’entêtes à dire, mais ça ne les a pas empêché de te vider l’estomac, de t’injecter avec un cocktail d’antidotes un peu désespéré, à la recherche de cette substance qui n’était pas là. C’est un mystère médical que tu es très peu enclin à aider à résoudre. La vérité, c’est que tu préfères qu’on pense que tu as essayé de te payer une sortie de rockstar plutôt qu’on connaisse la dépendance bien plus honteuse dans laquelle tu étais tombé.
Il s’était donc abandonné au travail avec une énergie maniaque renouvelée, pour oublier toute cette honte qu’on n’avait pas réussi à pomper hors de lui comme le reste. Jusqu’à ce que l’épuisement le rattrape au tournant.
Tu ne t’es pas senti sombrer, pas une seconde, car ton réveil te surprend fort hors de l’inconscience. Le bruit de l’ordinateur qu’on déplace sans douceur fait tressaillir ses paupières qui peinent à s’ouvrir. Sans doute se serait-il prestement rendormi sans ce contact sur son genou qui le fait sursauter brusquement. Ses mains s’agrippent sur les rebords du lit comme sur ceux d’une chaloupe en haute mer. Le pauvre homme jette des regards affolés autour de lui, sans comprendre où il vient de s’éveiller.
Le claquement des mains ramène son attention à la silhouette près du lit. Quand tu reconnais Uranie, un soupir de soulagement t’échappe alors que tu te laisses retomber sur le matelas, ce qui est bien ironique car elle est là à te menacer de divers sévices que tu aurais probablement mérité.
Sans doute est-il content de la voir l’engueuler plutôt qu’un.e autre. Les brumes du sommeil t’empêchent peut-être de la soupçonner de sombres desseins pour le moment. Tu as des affaires bien plus pressantes à régler dans l’instant.
« Ces rats ont confisqué mes cigarettes... Dis-moi que tu en as, par
pitié », se plaint-il comme s’il avait été victime d’une négligence criminelle de la part du personnel soignant.
Il pourra endurer le malaise de cette conversation beaucoup mieux sachant qu’il fume en cachette malgré qu’on lui ait interdit. Non tu n’es pas très fier qu’elle te voit dans cet état. Il y a quelque chose de rassurant dans l’idée de se cacher derrière un écran de fumée pour s’échanger les mots difficiles. Comme dans le bon vieux temps.
Mais Uranie ne se contentera pas de s’arrêter à ses impolitesses (tu crois bien l’avoir entendu te traiter de charogne). Cependant, Temperance ne sait pas exactement ce qu’elle est venue chercher dans la chambre aux murs trop blancs. Alors il hausse les épaules avec un air plein de malaise. Que dire? Il n’est pas du genre à s’excuser pour rien. Et il ne sait plus ce qu’Uranie peut bien penser de sa décadence.
Cela fait bien longtemps que leurs conversations n’ont pas tourné autour des chiffres et des objectifs. C’est ce qui se passe lorsqu’il faut se parler le jour, sous les néons, où les ami.e.s deviennent collègues gêné.e.s qui ne se reconnaissent plus. Pourtant, il a l’impression que c’est l’Ura(nuit) qui est venu le visiter. Et c’est un peu trop à vivre sans fumée.
Temperance n’était pas fatigué, il allait même très bien. Malgré ce que les rumeurs avaient déjà commencé à faire croire à travers les couloirs du Hallmark, il n’avait pas été victime d’une vraie surdose. C’est ce que tu t’entêtes à dire, mais ça ne les a pas empêché de te vider l’estomac, de t’injecter avec un cocktail d’antidotes un peu désespéré, à la recherche de cette substance qui n’était pas là. C’est un mystère médical que tu es très peu enclin à aider à résoudre. La vérité, c’est que tu préfères qu’on pense que tu as essayé de te payer une sortie de rockstar plutôt qu’on connaisse la dépendance bien plus honteuse dans laquelle tu étais tombé.
Il s’était donc abandonné au travail avec une énergie maniaque renouvelée, pour oublier toute cette honte qu’on n’avait pas réussi à pomper hors de lui comme le reste. Jusqu’à ce que l’épuisement le rattrape au tournant.
Tu ne t’es pas senti sombrer, pas une seconde, car ton réveil te surprend fort hors de l’inconscience. Le bruit de l’ordinateur qu’on déplace sans douceur fait tressaillir ses paupières qui peinent à s’ouvrir. Sans doute se serait-il prestement rendormi sans ce contact sur son genou qui le fait sursauter brusquement. Ses mains s’agrippent sur les rebords du lit comme sur ceux d’une chaloupe en haute mer. Le pauvre homme jette des regards affolés autour de lui, sans comprendre où il vient de s’éveiller.
Le claquement des mains ramène son attention à la silhouette près du lit. Quand tu reconnais Uranie, un soupir de soulagement t’échappe alors que tu te laisses retomber sur le matelas, ce qui est bien ironique car elle est là à te menacer de divers sévices que tu aurais probablement mérité.
Sans doute est-il content de la voir l’engueuler plutôt qu’un.e autre. Les brumes du sommeil t’empêchent peut-être de la soupçonner de sombres desseins pour le moment. Tu as des affaires bien plus pressantes à régler dans l’instant.
« Ces rats ont confisqué mes cigarettes... Dis-moi que tu en as, par
pitié », se plaint-il comme s’il avait été victime d’une négligence criminelle de la part du personnel soignant.
Il pourra endurer le malaise de cette conversation beaucoup mieux sachant qu’il fume en cachette malgré qu’on lui ait interdit. Non tu n’es pas très fier qu’elle te voit dans cet état. Il y a quelque chose de rassurant dans l’idée de se cacher derrière un écran de fumée pour s’échanger les mots difficiles. Comme dans le bon vieux temps.
Mais Uranie ne se contentera pas de s’arrêter à ses impolitesses (tu crois bien l’avoir entendu te traiter de charogne). Cependant, Temperance ne sait pas exactement ce qu’elle est venue chercher dans la chambre aux murs trop blancs. Alors il hausse les épaules avec un air plein de malaise. Que dire? Il n’est pas du genre à s’excuser pour rien. Et il ne sait plus ce qu’Uranie peut bien penser de sa décadence.
Cela fait bien longtemps que leurs conversations n’ont pas tourné autour des chiffres et des objectifs. C’est ce qui se passe lorsqu’il faut se parler le jour, sous les néons, où les ami.e.s deviennent collègues gêné.e.s qui ne se reconnaissent plus. Pourtant, il a l’impression que c’est l’Ura(nuit) qui est venu le visiter. Et c’est un peu trop à vivre sans fumée.
code par drake.
uranie & temperance
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Uranie Lecloizot |
Never sleeping always creeping
Dim 23 Mai - 0:44
|
Le corps se secoue, réveille ses chaires.
Et tu toises de ta hauteur, glisse ta colonne dans un fauteuil à proximité que tu viens rapprocher. Ta présence aux côtés de l’alité ferait une peinture tout à fait décadente sur les murs d’un musée. Car cette proximité n’a rien d’un mirage miraculé, d’une fausse inquiétude, ô combien tu aimerais pouvoir le prétexter avec toute l’ardeur qui tempère tes veines obstruées.
Il quémande et tu t’exécutes, mollement, docilement. Le paquet quitte tes poches pour atterrir sur ses cuisses emmitouflées, tu lâches un râle exaspéré. De ceux qui se fichent de trahir tes humeurs délabrées, de rabrouer.
« Les pertes seront comptées. »
L’avarice te va mal au teint, la parcimonie avec laquelle tu observes et compte énumérer les cadavres qu’il risque de fumer.
Et puis se peint sur le carmin, ton teint diaphane, ce ressentiment mal-gardé. Lèvres pincées pour regard orageux, les bras se reposent sur les accoudoirs de velours. Le bout de ton pied balance énergiquement ta chaussure défaite, tu toises dans un silence, mortier des pensées.
Tu aurais dû viser le visage Uranie, lui lancer avec hargne et tourner les talons. Le laisser s’étouffer avec l’asphalte, bloquer les fenêtres que le tabac froid attaque sa fausse vitalité jusqu’à le gangréner.
L’asphyxier.
« Me regarde pas avec tes yeux dégoulinants, j’ai envie de te terminer à la force de ton oreiller. »
Et si la violence cadence votre tête à tête inopiné, c’est que tu ne sais pas comment l’exprimer. Où te positionner. Car entre vous, la relation passée est morte, enterrée. Sauver les restes d’une cause perdue c’est aller contre vos esprits pragmatiques, violenter vos fiertés.
Qu’il est difficile de prétexter l’innocence, de feindre l’ignorance.
D’ignorer ce qu’il a été.
Des soirées de perditions, des horizons calfeutrés par l’accumulation de vos mots, mégots. S’enchaîner aveuglément à l’allié unique, partager à deux un vilain secret.
La rigidité te monte à la tête.
Brusque, tu retires ta veste, défait toute forme de tissus étranglant, t’oppressant. S’installer, se défaire des superficialités avec lesquelles tu t’es encombrée. La chemise est tirée, tu la froisses entre tes mains, abandonnant tes chaussures d’un mouvement las.
Rabattant tes jambes contre ton corps, pieds sur le fauteuil, tu récupères dans ta guerre une cigarette.
T’installer car tu sais que le temps va se dilater.
C’est votre pouvoir à vous.
« On sera deux à être débraillé comme ça. »
Dans le silence, l’ongle se ronge sous tes dents.
Qu’il est déplaisant.
Un boulet sentimental aux chevilles, tu souffles l’ivresse bleutée en sa direction. Dans l’espoir de le rendre flou, que la nuée couvre vos états d’âmes ankylosés.
« Me fais pas arracheuse de dents Temperance, je montre patte blanche. »
HRP — ...
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Temperance Bland |
Never sleeping always creeping
Lun 24 Mai - 15:29
miserable together
Heureusement qu’Uranie ne se fait pingre qu’à moitié. Temperance lui rachètera bien un paquet ou deux s’il peut fumer tout ce qu’il peut avant de se faire prendre par son médecin. Uranie dit qu’elle va compter les pertes, mais lui n’a pas la tête aux chiffres et aux comptes, bien qu’il aimerait.
« Oui, oui », rétorque-t-il distraitement, trop occupé à sortir une cigarette d’entre les autres sur ses genoux avec révérence.
Juste le poids familier du cylindre entre tes lèvres te donne l’impression d’avoir repris un tant soit peu forme humaine. Un tout petit ancrage en papier, même pas encore allumé. Alors, tu jettes un regard vers Uranie, qui vient de te sauver sans trop savoir peut-être. Peut-être a-t-elle oublié? Ou peut-être pas, car elle te gronde en te promettant de nouvelles violences.
C’est peut-être la fatigue, c’est peut-être que cela fait si longtemps qu’elle ne lui avait pas parlé en des mots si sincères, mais Temperance se trouve sans réplique, incertain, la cigarette encore éteinte qui pendouille entre ses lèvres. Tu as toujours répondu à la violence par la violence, pourtant,
de savoir qu’on ferait tout ce chemin pour te faire manger ton oreiller réchauffe le vide de tes entrailles.
C’est plus dur de répondre à la tendresse, même déguisée, alors tu baisses les yeux comme ordonné.
Ce n’est pas comme faire du vélo, il ne suffit pas de remettre les pieds dans une amitié pour tout de suite retrouver l’aisance et les rires qui ne se cachent pas derrière les mains. Mais lorsqu’Uranie décide brusquement de s’abaisser à son niveau, Temperance camoufle un sourire qu’il semble adresser au paquet dans lequel elle se sert.
Tu ne la croyais plus intéressée à fréquenter la vermine. Elle avait préféré la justice aux escroqueries, même si ces dernières avaient été le berceau de vos sympathies. Tu n’avais jamais compris ce désir de marcher au soleil, quand tous ses conforts l’attendaient dans l’ombre. Et pourtant, Uranie était bien là, à souffler l’intimité sur ton visage, comme vous l’auriez fait il y a quelques années.
En se perdant silencieusement en nostalgie, Temperance se fait anormalement avare de ses mots, ce qui n’échappe pas à l’ex-milicienne. Pendant un moment, l’odeur de la fumée lui a presque fait oublier pourquoi iels étaient dans cette chambre aux murs pas encore jaunis. Ses yeux se voilent alors qu’il soupire.
« Passe-moi ton feu d’abord. »
Un court sursis avant de devoir en venir aux innommables. C’est que ces sagouin‧e‧s lui ont pris aussi son briquet. De peur qu’il roule et fume un rideau peut-être? Il ne méritait certainement pas autant de zèle. Le trésorier des cobras se penche vers l’autre, dans un accès rare de fragilité. Tu allumes toujours tes propres cigarettes, car on ne doit pas te voir à tendre la nuque ainsi à n’importe qui, à attendre l’intervention d’un‧e autre pour avoir satisfaction. Tu as une réputation. Ou peut-être n’en as-tu déjà plus.
Il se sent déjà mieux quand le tabac vient lui effleurer les narines et qu’il aspire la première bouffée providentielle,
de quoi remplir ses chairs creuses jusqu’à en flotter.
Il redresse un oreiller d’une main pour l’installer derrière son dos redressé. Autant bien être confortable pour conter sa déchéance. Il n’ose tout de même pas regarder Uranie en face en l’avouant. Tu ne sais que trop pourquoi l’accident a eu le don de la troubler, ce n’est pas quelque chose que tu te sens assez solide pour affronter sans baisser la tête.
« Si t’es là, c’est que les nouvelles vont vite », maugrée-t-il à l’idée que tout le gang se régale de ses déboires tragicomiques.
Non seulement on lui prend ses cigarettes, mais en plus, on n’attend même pas quelques heures pour aller médire, pour faire des paris, pour sans doute faire gonfler l’histoire jusqu’à des proportions grotesques. À quoi aurait-il pu s’attendre de la part des cobras de toute façon?
« Tu en sais plus que moi, si ça se trouve. »
S’il avait passé les quelques jours précédents dans un espèce de brouillard furieux, il n’avait qu’un très vague souvenir de ce qui l’avait mené à se réveiller dans la chambre d’hôpital; seulement des bribes qui ne lui donnaient pas envie de se rappeler du reste.
Tu aurais presque envie de la questionner, mais tu as trop peur de ce qui s’est dit, trop peur que cela soit vrai. Alors, tu lui offres une de tes dents en cadeau, sans promettre qu’elle n’aura pas besoin de la pince pour les autres. Tu fais la grimace, la franchise a le pire des arrière-goûts.
« Je ne sais pas quoi dire »
Tu n’iras pas te lamenter, geindre « on m’a drogué à mon insu ». Ce serait là un mensonge qui se prend trop pour une vérité.
« Je croyais que j’étais en contrôle et je me suis fait avoir. »
« tu sais comment c’est », aurais-tu pu ajouter, mais cela fait trop longtemps que vous ne vous êtes pas avoués vos laideurs, Uranie et toi.
« Oui, oui », rétorque-t-il distraitement, trop occupé à sortir une cigarette d’entre les autres sur ses genoux avec révérence.
Juste le poids familier du cylindre entre tes lèvres te donne l’impression d’avoir repris un tant soit peu forme humaine. Un tout petit ancrage en papier, même pas encore allumé. Alors, tu jettes un regard vers Uranie, qui vient de te sauver sans trop savoir peut-être. Peut-être a-t-elle oublié? Ou peut-être pas, car elle te gronde en te promettant de nouvelles violences.
C’est peut-être la fatigue, c’est peut-être que cela fait si longtemps qu’elle ne lui avait pas parlé en des mots si sincères, mais Temperance se trouve sans réplique, incertain, la cigarette encore éteinte qui pendouille entre ses lèvres. Tu as toujours répondu à la violence par la violence, pourtant,
de savoir qu’on ferait tout ce chemin pour te faire manger ton oreiller réchauffe le vide de tes entrailles.
C’est plus dur de répondre à la tendresse, même déguisée, alors tu baisses les yeux comme ordonné.
Ce n’est pas comme faire du vélo, il ne suffit pas de remettre les pieds dans une amitié pour tout de suite retrouver l’aisance et les rires qui ne se cachent pas derrière les mains. Mais lorsqu’Uranie décide brusquement de s’abaisser à son niveau, Temperance camoufle un sourire qu’il semble adresser au paquet dans lequel elle se sert.
Tu ne la croyais plus intéressée à fréquenter la vermine. Elle avait préféré la justice aux escroqueries, même si ces dernières avaient été le berceau de vos sympathies. Tu n’avais jamais compris ce désir de marcher au soleil, quand tous ses conforts l’attendaient dans l’ombre. Et pourtant, Uranie était bien là, à souffler l’intimité sur ton visage, comme vous l’auriez fait il y a quelques années.
En se perdant silencieusement en nostalgie, Temperance se fait anormalement avare de ses mots, ce qui n’échappe pas à l’ex-milicienne. Pendant un moment, l’odeur de la fumée lui a presque fait oublier pourquoi iels étaient dans cette chambre aux murs pas encore jaunis. Ses yeux se voilent alors qu’il soupire.
« Passe-moi ton feu d’abord. »
Un court sursis avant de devoir en venir aux innommables. C’est que ces sagouin‧e‧s lui ont pris aussi son briquet. De peur qu’il roule et fume un rideau peut-être? Il ne méritait certainement pas autant de zèle. Le trésorier des cobras se penche vers l’autre, dans un accès rare de fragilité. Tu allumes toujours tes propres cigarettes, car on ne doit pas te voir à tendre la nuque ainsi à n’importe qui, à attendre l’intervention d’un‧e autre pour avoir satisfaction. Tu as une réputation. Ou peut-être n’en as-tu déjà plus.
Il se sent déjà mieux quand le tabac vient lui effleurer les narines et qu’il aspire la première bouffée providentielle,
de quoi remplir ses chairs creuses jusqu’à en flotter.
Il redresse un oreiller d’une main pour l’installer derrière son dos redressé. Autant bien être confortable pour conter sa déchéance. Il n’ose tout de même pas regarder Uranie en face en l’avouant. Tu ne sais que trop pourquoi l’accident a eu le don de la troubler, ce n’est pas quelque chose que tu te sens assez solide pour affronter sans baisser la tête.
« Si t’es là, c’est que les nouvelles vont vite », maugrée-t-il à l’idée que tout le gang se régale de ses déboires tragicomiques.
Non seulement on lui prend ses cigarettes, mais en plus, on n’attend même pas quelques heures pour aller médire, pour faire des paris, pour sans doute faire gonfler l’histoire jusqu’à des proportions grotesques. À quoi aurait-il pu s’attendre de la part des cobras de toute façon?
« Tu en sais plus que moi, si ça se trouve. »
S’il avait passé les quelques jours précédents dans un espèce de brouillard furieux, il n’avait qu’un très vague souvenir de ce qui l’avait mené à se réveiller dans la chambre d’hôpital; seulement des bribes qui ne lui donnaient pas envie de se rappeler du reste.
Tu aurais presque envie de la questionner, mais tu as trop peur de ce qui s’est dit, trop peur que cela soit vrai. Alors, tu lui offres une de tes dents en cadeau, sans promettre qu’elle n’aura pas besoin de la pince pour les autres. Tu fais la grimace, la franchise a le pire des arrière-goûts.
« Je ne sais pas quoi dire »
Tu n’iras pas te lamenter, geindre « on m’a drogué à mon insu ». Ce serait là un mensonge qui se prend trop pour une vérité.
« Je croyais que j’étais en contrôle et je me suis fait avoir. »
« tu sais comment c’est », aurais-tu pu ajouter, mais cela fait trop longtemps que vous ne vous êtes pas avoués vos laideurs, Uranie et toi.
code par drake.
uranie & temperance
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Uranie Lecloizot |
Never sleeping always creeping
Lun 31 Mai - 13:27
|
Tu n’aimes ni ce que tu vois, ni ce que tu entends.
Tu aimerais censurer le tout. Par de larges bandes noires indélébiles, une musique trop forte pour vos ouïes fines. Tout recouvrir, tout oublier car le temps n’a pour fonction que de vous dissoudre dans l’acidité de vos actes manqués.
Une valse russe s’immisce entre tes synapses violentés, la rumeur mélodique s’écrase à tes pieds lorsque tu comprends la mouvance hasardeuse de ses souvenirs buvards.
Le regard est bas et tu humectes tes lèvres avec regret lorsque le souvenir de tes lippes carmines faussement indélébiles revient à ton esprit. C’est le strip-tease de vos âmes effarées, le retour à des temps simplets. Le goût âcre de la solution cosmétique te force à tirer une nouvelle fois sur l’asphalte gominée, à embrumer ton regard poreux.
« Elles vont vite oui. »
Vipérines, elles s’immiscent dans les couloirs, teintent les blouses blanches regroupées, serpentines qui n’ont de cesse de piailler.
Et tu te revois,
Tes airs sévères qui tambourinent tes tempes, ta voix grave qui incombe de milles plaies. Que celui et celle qui parlera sera incombé de ces responsabilités, au nom de celui qui est alité. Que tu viendras traquer les messes basses interdites, que tu mettras au bûcher les curieux. Sorcière qui prend sa revanche, tu as quitté la salle de repos des concernés en laissant derrière toi une traînée de poudre.
« Considère-les au ralenti pour le moment. Je m’en suis occupé, si ça veut dire quelque chose. »
Et à ton échelle, tu sais que cela peut valoir peu. Qu’il n’y a de tout puissant que ton volume haineux.
Mais tu oses espérer que ta fausse autorité a su éveiller en leurs entrailles crispées quelques peurs cachées, que ton regard mort a su percer les cuirasses de psyché.
Le regard perdu, tes ongles viennent râper, effacer les restes de pourpre appliqué sur tes lèvres. Ne plus se soucier des apparences, retrouver les travers, petites névroses de Proust.
Tu t’en veux, un peu.
De t’être laissée gangrené par des émotions dilapidées, présumées mortes de par les années.
Et puis ça se force à toi, tu renifles dans un ricanement avorté, sans sourire pour l’auréolé. L’histoire qu’il dépeint est brève, sans détails, il n’y a rien d’étonnant venant de lui. De cette tête blonde où l’imagination est morte, qui se force à lui sous le coup des substances attisantes. Exacerbé les macchabées, choper un bout de déité pour se sentir couler parmi les choisis, les élus de cette route courte et abrasive.
« Comme n’importe qui, t’es malheureusement pas un cas unique. »
T’es pas unique tout court.
Et elle non plus.
Taper du poing, s’époumoner pour crier aux ravages serait là une solution de facilité. Venir moraliser quant aux méfaits, prévenir, prêcher. Qu’il serait simple de se vautrer dans sa propre désespérance, Temperance. Mais toi, t’as décidé que tu te l’interdisais, que les sous-entendus seraient muets.
Et tu observes, détailles ses paupières basses au bout desquelles ses cils blonds couvent son regard. Tu t’arraches doucement à ton assise, ta torpeur, décolle ta colonne malmenée pour venir appuyer ta paume sur son front échevelé, caresser cette image faussée d’un gamin innocenté de par ses airs de chérubin grisé.
« Que tu veuilles te foutre en l’air, c’est un fait. Je suis pas celle qui viendra te juger. Je t’en empêcherai pas d’ailleurs. »
Tu fabules, romances, vantes, inventes.
Bien sûr que toutes ces choses là, tu les désires, qu’elles te démangent. Mais vous n’êtes plus ce que vous étiez, vous vous êtes mutuellement abandonnés.
« Ce qui m’intéresse c’est de savoir comment quelqu’un fait une overdose le ventre vide et le sang pur. »
T’es pas médecin, les notions qui gravitent autour du personnel te sont volatiles, lointaines. C’est tout un métier comme on dit. Il y a pourtant ce détail, ce manque d’idéal qui vient mortifier cette histoire.
Et tu remets une de ses mèches en place, recule doucement ta main. Ne pas brusquer.
HRP — ...