Lorsqu'ils traversent les portes du bar Zadig se force à ne pas penser à la claque - l'euphorie qu'il a ressenti
quand elle lui avait souri (encore et encore et encore)
sans s'arrêter une seule fois sans le lui reprendre avec un coup de griffe une remarque acérée.

Plus que les contacts légers qu'ils avaient échangé, c'était son rire, vraiment
qui l'avait secoué au plus profond de son être.

Le son avait résonné dans sa tête tout le long du chemin
alors même qu'il était parvenu à balancer des idioties - l'air de rien.
Clair comme du cristal le rire de Theodora l'avait suivi, que même la musique indécemment forte dans les enceintes éparpillées n'était parvenue à lui faire oublier.
Même pas les cris hystériques de la bande d'amis qui les accueillent - les pilliers de bar, le bureau des étudiants, les party animals - comme des jeunes mariés à leur cérémonie.

Et même s'ils ne la connaissent pas, ils l'accueillent à bras ouverts et en hurlant. Ne se permettent pas de la secouer comme ils le font avec Zadig mais leurs proposent de se joindre à eux.

❝ Allez, Darcy c'est soirée karaoké !

❝ Oh Theo - je peux t'appeler Theo ? Tu sais qu'il peut chanter ?

❝ Mais foutez moi la paix bande de bâtards, j'aurais jamais dû venir vous voir !

Il leur adresse un beau doigt d'honneur - mais le sourire le trahit, tandis qu'il se tourne vers sa belle.
Zadig baisse les yeux vers le bras qui a entouré machinalement la taille gracile de la it-girl - le geste si naturel qu'il n'a même pas réalisé à quel moment il l'y a posé (dès l'entrée, semble-t-il)

Puis il la conduit jusqu'au bar sans un regard en arrière, la laisse s'installer avant d'interpeller la barmaid qui leur fait signe qu'elle ne va pas tarder.

❝ Désolé, ils sont un peu trop enthousiastes, parfois.

Un simple clin d’œil en guise de réponse, car en vérité il n’avait pas idée à quel point il en avait envie (qu’ils les regardent)
Mais elle, surtout (ah, qu’est ce qu’il avait envie de lui montrer)
toute l’étendue de son monde et lui tout entier, pour qu’enfin elle puisse le voir lui.

❝ Le seul et l’unique, rien que pour toi.

En utilisant le ton de la plaisanterie à outrance, il espère que ça suffira à lui faire croire (à leur faire croire) qu’il n’y a de vrai que ce qu’elle a envie de rendre vrai.
Et lève son verre avec elle.

❝ À la nôtre.

À leur drôle d’amitié ; leur idylle qui n’a de faux que le nom, qui n’a pas besoin de définition.
Il descend sa pinte plus rapidement que de raison – et la requête qui arrive lui arrache un sourire à travers la mousse.

❝ Ah, je sais pas si tu mérites. Il lui offre un rictus et se prépare à esquiver si elle décide de l’attaquer. Et puis je suis laaaargement trop sobre pour faire ce genre de conneries.

La barmaid assène deux shots devant eux – comme si ses paroles avaient formulé un souhait.
Mais il sait que les génies n’existent pas etun coup d’œil derrière lui suffit à lui confirmer que ses génies à lui sont des étudiants en médecine complètement éclatés après une heure de célébration.

Mais il ne s’attarde pas
attiré comme un aimant il se retourne vers Theodora, incapable de détourner trop longtemps le regard quand il sent le sien partout sur lui.

❝ Mais mettons que je le fasse. Tu monterais sur scène avec moi, Theodora ?

Laquelle, des Theodora ?
La vraie la fausse la vraie fausse la fausse vraie ?

Oh, peu importe, vraiment
il sait Zadig que peu importe ce qu’elle lui donne
c’est déjà suffisant

Il renverse la tête en arrière et s'esclaffe
avec une sincérité qu'il n'a pas besoin de feindre, et les choses semblent alors plus simples quand il n'a plus besoin de faire semblant.

❝ Tu sais, je ferai n’importe quoi pour toi.

Ce n’est qu’une plaisanterie - une disquette bien placée, rien que pour la charrier.
Mais un éclair de surprise passe dans ses yeux, juste avant qu'il ne prenne la fuite vers la table de ses camarades qui sont déjà levés (ravis, qu'il ait répondu à leur appel).

Ils sont quatre sur scène quand les premières notes retentissent
One Direction à fond dans les hauts-parleurs ; et comme les grands ados qu'ils sont se mettent à hurler. Mais en bon musicien Zadig a appris à chanter, et l'effort est minime puisqu'il n'est là que pour s'amuser. Les fois où il n'échange pas de regards avec le reste du boys band, Zadig ne peut s'empêcher d'observer Theodora - s'assurer qu'elle s'amuse, la caméra levée vers lui.

Au moment du bridge il saute de la scène, s'approche d'elle d'un air dramatique et glisse à ses pieds, genou à terre (baby, you light up my world like nobody else) plaque la main qui ne tient pas le micro sur son coeur (the way that you flip your hair gets me overwhelmed) et ses yeux s'illuminent quand il voit l'hilarité dans les siens (but when you smile at the ground) son coeur rate un battement et il tend la main pour prendre la sienne (it ain't hard to tell) dépose un baiser sur ses phalanges et esquisse un sourire tandis qu'il la tire vers lui

Ignorant ses protestations il les emmène au milieu de la salle où les autres étudiants ont déjà commencé à sauter au rythme de la musique mal chantée.
Il la fait tourner dans un sens puis dans l'autre - l'invite à danser alors qu'ils enchaînent avec une autre de ces chansons throwback dont il ont annoncé la couleur.

Et quand l'adrénaline retombe, qu'ils ont fini de s'épuiser au milieu des corps qui s'agitent - Zadig la ramène là où il l'avait kidnappée, commande un grand verre d'eau pour chacun et lui laisse le soin de compléter la commande.

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